Scieur de grande scie, Edmond a travaillé dans les moulins; il a commencé par celui de son père au rang 5 ouest de Saint-Narcisse. Il a aussi travaillé – comme on disant dans le temps- « chez les Dionne », au Lac Sainte-Anne sur la Côte Nord, chez Charles Vignola de Sainte-Odile et chez Théodore Morneau de Sainte-Blandine. Ce n'était pas toutes les familles qui avaient les moyens d'avoir une voiture à cette époque. Edmond a dû pensionner quelques temps chez la famille Théophile Roy de Sainte-Blandine. Il savait que son épouse devait s'occuper de la famille et de la ferme. Il a aussi travaillé pour le ministère des Transports. Fonctionnaire, notre père, on ne rit pas. Quelques années plus tard, son fils Yvan a pris la relève pour le moulin à scie; quel bonheur pour Edmond d'aller limer les dents de la scie. Même si Edmond travaillait à l'extérieur, il exploitait une ferme. Quelques vaches pour le lait, des cochons, des poules. Quand le temps de faire boucherie arrivait, Edmond se sauvait presque et allait solliciter l'aide de ses voisins, le plus souvent chez son beau-frère Omer Proulx. Edmond avait le cœur un peu trop sensible. Le temps des foins, un beau et dur moment dans l'été. Edmond ne possédait pas toute la machinerie agricole d'aujourd'hui. C'était la faucheuse, le râteau, mettre en « vailloches », placer le foin dans la « waguine ». Pas question de jouer dans le foin dans la grange (papa nous disait que ça faisait chauffer le foin et le faire pourrir); mais c'était tellement amusant de sauter et faire des culbutes. Dans le temps des Fêtes, Edmond jouait de l'accordéon, un autre de la guitare, de l'harmonica et ici on chante et on danse. Il aimait bien aussi faire sa petite danse (sa gigue) et sa chanson préférée (une bouteille de rhum – le vrai titre de cette chanson, nous ne l'avons jamais su). Que de beaux souvenirs. Prêter sa voiture, pas facile. Même avec les yeux doux, c'était NON. Edmond, même de sa voix grave, avait un cœur d'ange. Il avait de l'autorité : juste à nous regarder avec ses yeux bleus, nous savions quoi faire; pas de réplique. Il aimait la chasse, surtout la petite chasse (la perdrix, le lièvre). Il chassait bien plus de chevreuils assis dans la maison qu'à l'extérieur; même chose pour certains de ses fils. L'été, les dimanches après-midi (après la messe bien sûr), c'était d'aller se promener dans les rangs de Saint-Narcisse ou ailleurs quand il n'y avait pas de foin, de fraises ou de framboises à ramasser. C'était des moments magiques. Il nous parlait de l'histoire de chaque maison, de chaque lot, des gens qui y vivaient. Dans le village, tout le monde se connaissait. Edmond était toujours là quand on en avait besoin, toujours disponible. Edmond a construit sa maison dans le rang 5 ouest, maintenant appelé chemin Duchénier. En juillet 2004, il vendit sa maison pour venir s'établir au village avec son épouse, se rapprochant ainsi des services. Il a conduit sa voiture jusqu'à l'âge de 93 ans, très lucide et très prudent. Qui aujourd'hui peut le faire? Il y aurait encore bien des choses à raconter sur Edmond, mais une vie de 93 ans, c'est un livre qu'il faudrait écrire. Une vie bien remplie pour Edmond qui nous a quittés le 1er juillet 2008 à l'âge de 93 ans 4 mois, à l'hôpital St-François-d'Assise, pour rejoindre la grande famille de Dieu. Il était, jusqu'à ce jour, le doyen de la paroisse.

 

Tante Cécile