En certain temps de l'année, les mariages ne pouvaient se faire: durant l'Avent, le carême, les jours de fête d'obligations, comme la Toussaint, le 8 décembre, jour de la fête de l'Immaculée conception, Noël et d'autres peut être. Dans ce temps-là, les mariages avaient toujours lieu le matin et la plupart des gens voulaient communier à leur messe de mariage donc il fallait être à jeun. Après la cérémonie, les gens se rendaient ordinairement chez le père de la mariée, pour le dîner, mais il y avait quelques fois des arrêts chez la parenté et on pouvait prendre un petit verre et quelques friandises. Qu'ils étaient bons ces dîners de noces : cipaille, tourtières, rôti, pain de ménage, confitures aux fruits des champs, gâteaux, tout était délicieux. Et ces repas avaient été préparés par la mère et les filles (dans ce temps-là, pas de garçon autour des chaudrons)... et comme les mariages avaient lieu surtout en été et que le tout se cuisait à la maison, il doit y avoir eu beaucoup de sueurs qui se sont versées près du poêle à bois. Dans ce temps-là, pas question de nocer à l'hôtel, ce n'était pas la mode! Le soir, les invités se rendaient chez le père du marié pour un autre gros et bon repas. Comme pour le repas du midi, il y avait toujours plusieurs tablées. Puis, comme chaque paroisse avait ses violoneux, ses joueurs d'accordéon ou d'harmonica, on en profitait pour danser et “swing la bacaisse dans le fond de la boîte à bois”. La danse pouvait se poursuivre jusqu'aux petites heures du matin, mais on s'arrêtait de temps en temps, le temps de se rafraîchir, prendre un p'tit verre de vin de gadelles ou de pissenlit ou un morceau de sucre à la crème et vive la compagnie. Les voyages de noces n'étaient ordinairement pas longs, s'il y en avait, mais parfois la noce durait plusieurs jours, la parenté était grande et était tricotée serrée. Les cadeaux de noces étaient simples et offerts avec tout l'amour de nos moyens. Les plus chanceux, je crois, ce sont ceux qui recevaient de belles pièces d'artisanat fabriquées par des artistes comme étaient nos grands-mères, tantes ou amies. Il y aurait encore beaucoup à dire sur le sujet, mais je vais terminer en vous parlant de mon mariage à moi. Le 20 juillet 1943, moi Cécile Gagnon fille de Albert Gagnon et de Joséphine Roy, j'épousais à l'église de St-François-Xavier de Les Hauteurs, Adelme Vignola, fils de Napoléon Vignola et de Albertine Poirier de Saint-Narcisse. Ma soeur Monique, le même jour épousait Irenée Lepage fils de Jacob et de Élise Morneau. Un mariage double. Notre noce s'est déroulée comme partout ailleurs je crois, sauf que nous avons eu droit à trois gros repas vu qu'il y avait trois familles d'impliquées: Gagnon, Vignola et Lepage. Chez mon beau-père le musicien était monsieur Hormidas Lepage accompagné à la guitare par son épouse Alphéda. Comme nous étions pendant le temps des rationnements de cette période de guerre, je réalise maintenant toutes les ruses qui ont dû être employées pour se procurer sucre, thé, beurre afin d'accommoder tant de monde. Aujourd'hui, les mariages sont plus rares et beaucoup plus coûteux, mais c'est l'époque. Je ne voudrais pas cependant que les jeunes d'aujourd'hui connaissent les privations exigées par la grande dépression économique “la vraie”. À tous les jeunes qui envisagent un mariage prochain, beaucoup de joie, de bonheur et de réussite et la persévérance dans leurs amours. Je vous aime, soyez heureux!

 

Tante Cécile