Avril est là, enfin. Ses journées ensoleillées, l'air qui se réchauffe, attirant de nouveaux oiseaux aux mangeoires, même les vilains étourneaux qu'on arrive à trouver "intéressants"... Oui, le printemps est là avec toutes ses joies, et parmi celles-ci, les sorties à la cabane à sucre. Nous sommes chanceux d'avoir à proximité de Saint-Narcisse des sucriers (acériculteurs) assez bien installés pour recevoir la visite. T'as le goût de rencontrer des amis? T'as le goût de la bonne cuisine traditionnelle à la cabane? Profite du beau temps et va te sucrer le bec avec la tire sur la neige. Je compare les érablières d'aujourd'hui avec celle exploitée par mon père : à peine quelques centaines d'entailles à la chaudière, cueillette de l'eau d'érable à l'aide d'un traîneau tiré par un cheval, ensuite la longue évaporation dans la chaudière chauffée au bois durant des heures. De quoi avoir du sucre pour la grosse famille durant toute l'année, et un peu aussi pour les amis et la parenté. Il n'était alors pas question de se rendre à la cabane en auto, encore moins en autobus. Quand mon père partait faire sa "run de sucre", il était absent de la maison assez longtemps. Nous les enfants, on allait le voir à pied ou en raquettes. Si on partait assez tôt le matin, la neige nous portait par suite du gel de la nuit, c'était plus facile de s'y rendre. Hier comme aujourd'hui, faire les sucres, c'est un travail de longue haleine. Il faut préparer l'érablière, y faire le ménage : enlever les arbres morts ou tombés, nettoyer le "fond", enlever les érables en trop, traîner les billots, scier, fendre et corder le bois de chauffage obtenu, qui servirait à faire bouillir l'eau d'érable le printemps suivant. Dans le temps, ce travail s'accomplissait à l'aide du cheval de trait, les garçons de la famille travaillaient allègrement, c'était bien souvent des parties de plaisir mêlées au travail des bras. Aujourd'hui, avec la grosse machinerie, les travailleurs arrivent à faire beaucoup plus grand de territoire en forçant moins des bras. Cependant, d'autres tâches sont venues s'ajouter aux travaux forestiers. Les évaporateurs traditionnels ont été remplacés par des évaporateurs chauffés à l'huile. Le bois produit est alors vendu pour le chauffage en région. Cela nécessite moins de travail à l'évaporation. Les entreprises sont énormes et le travail aussi car, à part le sirop qu'elles produisent, elles exploitent maintenant des salles à dîner qui peuvent accueillir chaque jour quelques centaines de convives. C'est un travail épuisant et je lève mon chapeau à toutes ces personnes qui sont là du matin au soir, sourire aux lèvres, accueillant les visiteurs comme des amis qu'elles retrouvent à chaque printemps avec joie. Merci pour toutes ces joies, pour vos gentillesses qui contribuent à nous faire trouver la vie si belle!

 

Tante Cécile