Comme je n'ai jamais vécu dans les chantiers, j'ai eu recours à quelqu'un qui l'a fait et il m'a raconté comment ça se passait dans ce temps-là. J'ai contacté monsieur Doril Lepage, un gars de chez-nous et il a bien voulu me parler de la vie dans les chantiers de la Côte-Nord, à Godbout, Franquelin, Baie-Comeau et Forestville. C'était à peu près partout pareil. La vie était dure, les journées longues, la nourriture était ordinairement bonne et les distractions assez rares à part le travail. Dans ce temps-là, les opérations forestières débutaient en automne : octobre ou novembre et pour s'y rendre, les gars devaient prendre le bateau. On embarquait à bord du Jean Brillant (le Jean branlant) parce qu'il tanguait beaucoup, pour faire la côte, et le petit Rimouski pour se rendre à Forestville. Ça prenait ordinairement quatre heures pour faire la traverse. Rendu sur la Côte-Nord du fleuve, il n'était pas rare de faire 40 à 50 milles dans des voitures tirées par des chevaux, par la suite en autoneige (snowmobile) pour se rendre au camp. Il pouvait y avoir une cinquantaine de travailleurs par camp. Le dortoir était doté de lits de fer, superposés et munis de matelas (une amélioration car autrefois, une couche de branches de sapin servait de matelas). Le déjeuner se prenait vers 6 heures et les gars s'en allaient bûcher et revenaient au camp à la fin du jour. Ils travaillaient d'une noirceur à l'autre et le dîner se prenait la plupart du temps en forêt. C'était avant l'apparition des scies mécaniques et il fallait plusieurs coups de sciotte ou de godendard pour arriver à abattre assez de billes de pitoune pour se faire un salaire décent. Un travail ardu certes, mais avec du coeur au ventre, on s'en tirait assez bien. Il y encore beaucoup à dire sur le sujet et je ne veux pas utiliser tout le journal. Donc, je vous dis aurevoir et au mois prochain pour la suite.

 

Tante Cécile